2 juin 2003
Cela fait près de deux mois que jai fait ce pari stupide. Bon sang! Comment ai-je
pu proposer à Renaud une telle chose?
Son site «Pif Gadget n° 27» est une sacrée bonne idée et je lui en avais fait part.
Et puis, pour lui faire plaisir, je lui ai proposé de lui écrire un texte racontant,
trente-quatre ans après, lhistoire de ce numéro 27.
Mais que puis-je bien raconter sur ce numéro qui ne se distingue en rien dun autre?
Jai beau avoir de la mémoire, cela me semble «mission impossible» et Renaud va me
prendre pour un rigolo qui promet nimporte quoi.
3 juin 2003
Le n° 27 se trouve dans une grande boîte en carton tout en haut dun placard. Je
lai mis sur mon bureau et je lai regardé de travers comme sil
sagissait dun numéro «hostile». Je sens que je ne pourrai jamais dire grand
chose sur lui. Ah, sil sétait agi du numéro de la Poudre de Vie ou des Pois
Sauteurs, jaurais pu en raconter des tartines, mais le n° 27... tu parles!
5 juin 2003
Bon, je my mets...
Et pourquoi ne pas faire ça demain?
15
juin 2003
Je respire un grand coup et... |
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Page 1 |
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Au début, nous avions pris le parti de commencer lhistoire de Pif en page 1 sans
faire référence au gadget. Mais on sest vite aperçu que toutes les couvertures de
Pif Gadget se ressemblaient. Si bien que des acheteurs peu perspicaces pouvaient croire
que le numéro présenté chez leur marchand de journaux était le même que celui de la
semaine passée.
Alors, on a varié les «une» avec une couverture de Cézard, puis une autre sur les Tristus-Rigolus, une autre de Gotlib, une autre encore de
Mandryka pour en arriver à cette «une» historique où, pour la première fois dans un
grand dessin, apparaissent Pif et Hercule faisant la promo du gadget de la semaine. |
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Oui, la «une» du numéro 27 est donc historique. Cest aussi
la première fois que les dessinateurs de latelier réalisent la couverture.
Au 126, rue La Fayette, il y avait un petit hangar avec une verrière où Jacques Tabary
(pour «Totoche Poche» en particulier), Motti et Yannick (pour Pif) travaillaient. On
leur a donc apporté le gadget à illustrer et ils ont eu carte blanche. Ensuite, ils nous
ont apporté un crayonné que nous avons approuvé... et ça sest toujours passé
comme ça.
Je dois dire que cette couverture nous avait semblé un peu confuse et, trente-quatre ans
plus tard, je nai toujours pas compris ce que veulent dire les dessins du tableau
noir. |
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La rédaction pensait quun sommaire était indispensable à tout bon journal. En
fait, il ne servait pas à grand chose mais on a mis du temps avant de sen
apercevoir. On remarquera, en haut à droite, un dessin de latelier qui réalisait
tous ces petits dessins dont nous avions besoin.
Nombre déditos du rédacteur en chef nétaient pas
écrits par lui et pouvaient lêtre par chaque membre de la rédac'. Or celui-ci a
été écrit par moi et, si je men souviens, cest quil y a une raison.
Jétais à cette époque spécialement chargé du Journal des Jeux et je me
souvenais que, tout enfant, lune de mes lectures préférées était un petit
fascicule du nom de Cent Blagues. Pas très intellectuel certes, mais cétait une
passion.
Jai donc proposé de donner à ces blagues une grande place dans le journal et
lidée que les lecteurs envoient leurs «meilleures» et soient primés est venue
tout naturellement. Ce fut un grand succès. |
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Pages 3 à 7 |
Parmi les dessinateurs de Pif Gadget, Louis Cance était, hélas! celui que nous voyions
le moins souvent car il habitait à Aurillac et venait très rarement à Paris. Louis
Cance est un excellent dessinateur et aussi un très bon scénariste, mais le manque de
contacts directs a empêché un travail en profondeur sur lunivers de Pif.
Labandon de lunivers existant avant Pif Gadget (Tata, Tonton, Doudou, le
pavillon de banlieue...) avait été voulu par la rédaction pour moderniser la série (une
belle erreur à mon sens). Cela avait laissé un vide flagrant et cette histoire de Pif du
n° 27 en souffre. |
Je me souviens que lun des grands problèmes que nous avions
était celui de lorthographe. On recevait constamment des lettres dinstits
nous reprochant les fautes que nous laissions. Il faut dire que ni les dessinateurs, ni
les membres de la rédac' navaient de longues études derrière eux... La
secrétaire de la rédaction, Germaine, relisait donc les planches et je corrigeais au
mieux avec une plume «Sergent Major» et de lencre de Chine. Dans la dernière
bulle un «s» avait été oublié à la fin du mot «traine» et mon intervention
na pas été des plus délicates... Mais Germaine nétait pas irréprochable.
La preuve: elle avait oublié laccent circonflexe sur le «i» de «traîne»... |
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Pages 8 et 9 |
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Ces deux pages côte à côte symbolisent bien ce que fut Pif
Gadget. Dun coté, la recherche, linnovation, le risque et, de lautre,
des bandes de bonne qualité accessibles à tous. Il fallait que lenfant ait la
possibilité dévoluer, de découvrir, de passer dun style à lautre. Et
cest tout à fait consciemment que lon plaçait Couik à côté du Concombre. |
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Page 10 |
Je crois avoir vu Crespi une seule fois dans ma vie. Il habitait dans le Midi et sa
présence depuis les tout premiers Vaillant lui donnait un statut particulier.
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Pages 11 à 30 |
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Contrairement à dautres planches de ce numéro 27, je me souviens assez bien de ce
Robin des Bois. Il faut dire que le scénario de Jean Ollivier était excellent comme
toujours et que le dessin de Coelho est merveilleux. Les originaux étaient de grandes
dimensions et chaque case était pour moi un véritable tableau. Regardez cette planche 2 (page 12) où le traitement du blanc et du
noir reproduit à merveille lambiance de nuit que les flammes éclairent. |
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Regardez la composition des trois personnages de la première case
de la planche 3 (page 13). Une prouesse. |
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Et dans les cases 4 et 5 de la planche 13 (page 23), les mimiques
de ces trois personnages... |
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...et la beauté du château, exact dans tous ses détails. |
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Page 31 |
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On appelait ces pages de l«auto-pub». Cétait dessiné par léquipe de
latelier (Jacques Tabary, Yannick et Motti) sur des demandes de la rédac'. On est
loin des pubs commerciales «léchées». Le dessin de Pif y est ici particulièrement
maladroit. |
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Pages 32 à 38 |
Moins de trois mois avant que cette histoire paraisse, les Tristus-Rigolus avaient fait
une première apparition dans un épisode dArthur le Fantôme. Mais il ne faut pas
sy tromper, il était convenu dès lorigine que cette série prendrait vite
son autonomie et la présentation de cette série par Arthur pendant quelques semaines
était là pour que les amateurs de Cézard ne soient pas trop désarçonnés.
Je ne me souviens pas précisément du moment où notre ami Jean nous apporta ces
planches-là (il venait toujours lui-même les porter à la rédac' et on passait à
chaque fois au moins deux heures ensemble), mais en relisant ces deux épisodes je le
revois, heureux, entouré de toute la jeune rédac' qui avait abandonné tout travail pour
faire la fête au plus merveilleux des hommes.
A loccasion de la sortie de mon livre, tous les «anciens», rédacteurs et
dessinateurs, avec qui jai parlé ont été unanimes pour dire le choc ressenti à
la mort de Jean en 1977. |
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Page 39 |
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Au début, on se creusait la tête afin que personne ne puisse du tout savoir ce que
serait le prochain gadget. Notre règle était de garder la surprise totale.
Notre page de publicité nétait pas «vendeuse», cela navait rien à voir
avec les techniques modernes du marketing, mais nos lecteurs devaient sentir notre côté
amateur et bon enfant, notre naïveté, et cétait aussi cela qui plaisait.
Il en alla de même pendant des années. Ce fut aussi le cas pour les numéros de la
Poudre de Vie et des Pois Sauteurs (chacun 1 million dexemplaires).
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Page 40-49 |
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Javais discuté avec Roger Lécureux, sans doute à propos de cet épisode, du
«couple» formé par le Grêlé et Von Hartz. Je craignais quà la longue Von Hartz
apparaisse presque sympathique. Un peu comme Hercule par rapport à Pif... Roger
mexpliqua quil utilisait ce «couple» pour simplifier son histoire et rendre
son scénario plus efficace. Mais Roger, qui savait écouter, même un jeune blanc-bec
comme moi, convint quil lui fallait être plus vigilant pour ne pas tomber dans ce
travers. Dans les épisodes qui suivirent (par exemple ...Et lherbe repoussera),
Roger montra régulièrement le côté tragique de cette guerre et que les nazis (Von Hartz y compris), étaient capables des pires crimes. Ça servait aussi à cela la rédac'
de Pif Gadget. |
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Page 50 |
Il faisait chaud en cet été 69 et la rédac' réclama de pouvoir tester à grande
échelle le Super Gadget: le ventilateur de poche. Et pendant plusieurs jours dans tout le
126, rue La Fayette on entendit un bruit daérodrome. |
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Avez-vous remarqué quil n'y a pas la moindre pub dans ce
numéro?
Mady Chaignaud, qui était chargée de recueillir de la pub, avait toutes les peines du
monde pour en dégotter. Le journal était alors vendu à près de 300 000 exemplaires et
même avec un tel chiffre on parvenait difficilement à attirer les annonceurs. Il faut le
dire, il y avait vis-à-vis de nous un véritable ostracisme (comparez avec les Tintin,
Spirou et Pilote de lépoque qui vendaient trois fois moins que nous et dont les
tarifs étaient le double du nôtre). Cela a duré des années et nos finances avaient du
mal à le supporter. |
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Pages 51 à 68 |
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Mon livre comporte une partie assez conséquente sur le Journal des Jeux et sil
fallait que je commente ce Journal du n° 27 je ne ferais que me répéter. Juste quelques
mots pour dire que le jeu-concours primé (page 52) ne fut jamais bidonné. |
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Quant au gadget que lon trouve entre la page 58 et 61 il fait
partie de ces gadgets ayant un prix de revient faible et qui nous permettaient de
dépenser plus quand cétait nécessaire. Il nempêche quil sagit
là dun excellent gadget. Jimagine la fierté des lecteurs passant pour des
magiciens aux yeux de leurs parents et de leurs copains... |
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Page 69 |
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Mas, cétait vraiment le roi du gag!
Et Mas faisait toujours très attention à ce que sa planche corresponde à la saison où
le lecteur lirait son gag. Et là, nous étions en août 1969. |
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Page 70 et 71 |
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Il ne sagit pas du meilleur Gai-Luron et on a vraisemblablement gardé cette page
pour un numéro du mois daoût quand les lecteurs sont moins nombreux et plus
indulgents... |
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Page 72 |
Ah Mattioli! Il se sentait particulièrement à laise dans les strips (bandes) et on
peut dire que ses gags sont vraiment très bons. Mais le lecteur de lépoque avait
du mal à accrocher et on sest dit que cétait peut-être la forme strip qui
déroutait. Alors, plus tard, on lui a demandé de dessiner une histoire sur une page,
mais ça na rien changé.
Mais quimporte! Cétait de la grande BD et elle est reconnue comme telle
aujourdhui. Ce nest que plusieurs années après avoir quitté Pif Gadget que
jai appris que M. le magicien avait disparu juste après mon départ du journal. |
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Page 73 |
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Vous me croirez si vous voulez, mais je peux vous assurer que si je me souviens
parfaitement de Mas apportant ses planches de Léo, je ne me souviens aucunement des
scénarios de Jean Sanitas (le scénariste de Fanfan la Tulipe). |
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Page 74 |
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Cest vous dire si on aimait Mandryka à la rédac': deux séries dans le même Pif
Gadget. Cette série, comme lensemble de son uvre, na pas pris une ride.
Jai eu Mandryka au téléphone il y a quelques jours à propos du livre Pif Gadget:
la véritable histoire quil a particulièrement apprécié, et il ma dit
limportance de ses premières années aux Éditions Vaillant et à Pif Gadget, et
les bons souvenirs quil en gardait. |
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Page 75 |
Jai honte. Je ne me souviens même pas de
lexistence de cette publication (Pif. Les rois du rire). Par contre, remarquez le
coup de patte dArnal... simple et parfait. |
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Page 76 |
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Je nai gardé aucun souvenir particulier de cette planche. Aujourdhui,
jai régulièrement des entretiens téléphoniques avec Nicolaou, qui ne fut pas
seulement le dessinateur de Placid et Muzo mais aussi celui de quantités incroyables de
jeux et de bricolages pour les «Poches», tout en concevant nombre de gadgets. Il
ma dit: «Je vivais parfois une vie de forçat tant je travaillais à cette
époque.» |
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Page 77 |
Je peux vous assurer quil n'y a pas la moindre lettre bidonnée dans ce courrier des
lecteurs ! |
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Page 78 |
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Ouf ! jarrive au bout de ce pari et je ne pouvais rêver dune meilleure chute
que celle de ce Corinne et Jeannot ! |
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Voilà,
jai fini... |
Comment ? Jai écrit tout ça sur le numéro 27 ? ...pas croyable...
Je dis tout de suite au malin qui voudrait créer un site comparable à celui de Renaud
Péri que je ne suis pas partant pour réaliser le même exploit pour les autres numéros
de Pif Gadget car, comme le dit si bien Gai-Luron dans ce fameux numéro 27 : |
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c'était LHISTOIRE DU NUMÉRO 27 par Richard Medioni
ancien rédacteur en chef de Pif Gadget
Comment ??? Vous ne connaissez pas encore
son livre ?!
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